Echo
d'Iran N° 3, 2007-02-11
Les étudiants
se tournent vers les travailleurs
Le 7
décembre 1953 trois étudiants iraniens sont assassinés
par le police du shah lors d'une
grande manifestation de protestation contre la visite de
Nixon, le vice président des USA venu soutenir le Shah
et fêter le succès du coup d’Etat organisé par la CIA
contre le gouvernement national de Dr Mossadegh. Depuis
cette année le mouvement estudiantin iranien commémore
ce jour comme « Le Jour de l’Etudiant », bravant touts
les interdits, les menaces et la répression des régimes
en place ; monarchique ou théocratique. Chaque année, à
cette occasion, les militants s’expriment et donnent le
ton et les slogans qu’ils considèrent comme essentiel
pour l’avenir immédiat et la stratégie à long terme.
Force est de constater que tous les ans, ce sont les
slogans de caractère démocratique et orientés
essentiellement vers une défense générale des droits et
libertés civiques et politiques, choses légitimes et
fondamentales. Pendant des longues années les tendances
radicales et de gauche étaient les forces motrices de ce
mouvement
qui, de facto, le dirigeait en payant un lourd tribut
des prisonniers et des morts par balles ou sous la
torture.
Avènement du mouvement dit « 2 Khordad », jour de la
première élection de M. Khatami à la présidence, a
provoqué des nouveaux clivages et dans l’euphorie de sa
première élection, une domination des courants dits
« réformistes », qui de près et ou de loin, soutenait M.
Khatami.
Mais
l’échec retentissant de M. Khatami a donné un coup
d’arrêt à son mouvement, cela s’est traduit, avec un peu
de retard, dans l’affaiblissement de ces courants parmi
les étudiants. On sentait un frémissement, et depuis les
idées clairement de gauche se font leur chemin. A
l’occasion du 1er mai, les étudiants ont
organisé, dans certaines grandes universités, des
réunions et des séminaires où des militants du mouvement
ouvrier et estudiantin ont pris la parole et ont
souligné l’importance de la classe des travailleurs dans
les mouvements de transformation sociale. Mais malgré
cela il n’y avait pas une ligne affichée, avec des
positions claires et tranchées qui pouvait montrer
l’existence d’une tendance radicale de gauche avec des
revendications bien définies.
Cette année, à l’occasion de « Jour de l’Etudiant »,
malgré une forte mobilisation et l’omniprésence des
forces de sécurité et l’interdiction de toutes formes de
rassemblements, les étudiants ont franchit à leurs
habitudes tous ces interdits et ont commémoré, partout
dans les universités. A Téhéran ils ont même forcé leur
passage à travers des barrières montées par les forces
de sécurité en se battant avec eux et les obligeant à
reculer. Ils ont scandé des slogans contre le régime;
pour la défense des droits politiques et civiques ainsi
que pour la libération des prisonniers politiques;
contre la menace d’une agression impérialiste et surtout
pour une alliance entre les étudiants et d’autres
secteurs de la population comme les femmes et les
minorités nationales, avec une importance et place très
particulière pour les travailleurs revendiquant l’union
avec le mouvement ouvrier.
Parmi les tracts distribués il y avait un, qui a été
très largement distribué, avec comme titre ; « L’université
n’est pas une caserne! ». Dans ce tract sont
énumérés toutes les problématiques de la vie politique
en Iran avec des propositions claires et une orientation
pour une transformation radicale de la société
iranienne. La défense des activités syndicales et
surtout les syndicats ouvriers qui subissent une
répression farouche de la part du régime islamique, est
considérée comme centrale et le mouvement estudiantin
est clairement considéré comme « allié stratégique du
mouvement ouvrier».En conclusion le tract met l’accent
sur la défense des travailleurs arrêtés et harcelés; sur
la nécessité de mobiliser tous les syndicats des
travailleurs et les organisations de défense des droits
de l’homme dans le monde pour soutenir la lutte du
peuple iranien; et sur le devoir des étudiants
de
participer aux luttes des travailleurs, les femmes et
les jeunes tout en pensant à leur rôle dans la
solidarité internationale.
C’est la première fois qu’un tel programme de lutte est
présenté par un groupe des étudiants. Un véritable
tournant dans un milieu où, jusqu’ici, on mettait
l’accent d’une manière exclusive sur la défense des
libertés politiques sans faire allusion quelconque à la
justice sociale, comme si il n’y a aucun lien entre ces
deux axes de luttes dans un pays capitaliste comme la
république islamique d’Iran. Nous ne pouvons que nous
réjouir de l’apparition de cette tendance de la gauche
radicale qui essaie de mener les étudiants à lutter sur
deux axes interconnectés de la défense des libertés et
la justice sociale.
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