Echo
d'Iran N°
8, 2008-11-01,
La Sucrerie Haft Tappeh: Deux ans de lutte et les résultats
La Sucrerie Haft
Tappeh faisait partie des plus grands projets
industriels du régime du Chah. L'usine a commencé ses
activités en 1975 pour exploiter 12,000 hectares de
champs de canne à sucre dans la région du Khouzestan(sud
d’Iran). En 1977, la raffinerie de Haft Tappeh devint
l'une des plus importantes productrices mondiales de
sucre avec une production de 1,3 millions de tonnes (7
fois supérieure à la consommation intérieure qui était
alors de 180,000 tonnes).
Aujourd’hui la capacité de sa production est environ de 5
millions de tonnes, 4 fois plus que sa capacité en 1979.
Or, entre temps, les autorités ont multiplié par 7 les
champs de canne à sucre et les infrastructures, et en
plus, les techniques de raffinage se sont améliorées.
Selon avis des experts, normalement cette usine devrait
produire 11 millions de tonnes et non la moitié affichée
qui dépasse largement les besoins du marché nationale et
peut apporter des devises par l'exportation.
En 2007, suivant une logique néolibérale, le gouvernement a
décidé de privatiser l'usine. Pour cela il importe de
grandes quantités de sucre et envisage de céder
l'entreprise à l'Ayatollah Djannati, un homme puissant
du régime, qui décide, à son tour, de fermer
l'entreprise et licencier ses employés, dans le but de
construire de grands ensembles résidentiels sur ses
terrains et les vendre à des prix plus qu'attractifs!
C'est à dire détruire une activité industrielle pour la
remplacer par de la spéculation immobilière.
D’abord les travailleurs de ce complexa industriel protestent
contre ce projet de liquidation de cette entreprise de
plus de cinq mille travailleurs. Après l'échec de tous
leurs efforts, une série de grèves se sont déclenchées
pour empêcher sa privatisation, sa vente et sa
fermeture. Les revendications se portaient également sur
le limogeage du directeur, la dissolution du conseil
islamique de travail, la signature d'un contrat
collectif, la renouvellement des contrats de 3000
travailleurs temporaires et la non-fermeture de
l'entreprise. Et comme tous les grands mouvements
ouvriers récents en Iran ils ont revendiqué le droit à
la constitution d'un syndicat indépendant. En octobre
2007, les ouvriers de la sucrerie Haft-Tappeh qui, de
plus, n'avaient pas été payés depuis plusieurs mois, se
sont mis en grève et ont manifesté aux cris de " nous
avons faim, payez-nous ! ", les forces de sécurité du
régime ont brutalement réprimé la manifestation et les
travailleurs ont été molestés par les miliciens du
régime.
Durant deux ans, ces travailleurs ont organisé une douzaine
actions de protestations collectives de tous gendres. A
la suite de ces actions Ils ont obtenu certains de leurs
revendications dontt le limogeage du directeur de
l'entreprise. Cela a bien encouragé les travailleurs de
continuer leur combat sans relâche.
Pendant cette longue période de lutte, les autorités ont
utilisé tous les moyens répressifs contre les ouvriers.
A chaque occasion les forces de l’ordre du régime ont
violemment réagi et il y a eu plusieurs affrontements
sanglants. Par exemple, le 5 novembre, la veille d’une
grève prévue, M. Ramezan Ali pour, un ouvrier de l'usine
a été enlevé par la police secrète et a été sauvagement
torturé afin " d'avouer " que lui et ses camarades
étaient en train de « planifier » un complot contre la
sécurité nationale, (la même accusation portée contre
Monsieur Ossanlou, le président emprisonné du Syndicat
Vahed de la Régie du Transport Urbain de Téhéran et sa
Banlieue, pour laquelle il a écopé d’une peine de prison
de 5 ans). Mohammad Haydari, un autre ouvrier, a été
arrêté et sévèrement matraqué par la police politique.
Deux autres ouvriers, Ghorban Ali Pour et Mohammad
Hujari Mehr ont été arrêtés dans la rue et le tribunal
de justice du régime les a condamnés chacun à verser
l'équivalent de 5000 dollars (équivalant de 3 ans de
salaire) pour retrouver la liberté. Evidement par manque
de moyens, ils sont restés en prison et leurs camarades
pour obtenir leur libération se sont groupés devant la
prison et ont menacé de se mettre une nouvelle fois en
grève. Ce qu'ils ont obtenu. C'était la première fois
que le régime a recoulé devant la mobilisation des
travailleurs bien déterminée.
Cette victoire les a enhardis. De plus ils ont réussi
d'attirer la sympathie de plus en plus forte de la
population locale et les travailleurs à travers du pays…
La dernière action des travailleurs de Haft Tappeh date de
24-25 septembre 2008. Pendant 2 jours ils se sont mis en
grève pour obtenir les paiements de leurs salaires et
primes et la libération de 2 de leurs camarades arrêtés
la semaine précédente. La quasi-totalité des
travailleurs et employés du complexe y ont pris part. La
grève s’est terminée par une grande victoire et la
direction a pratiquement accepté toutes leurs
revendications.
La suite est encore plus probante. Après deux ans de lutte et
sacrifice, d’emprisonnement et de privation, les
travailleurs de Haf Tappeh ont décidé aller plus loin et
en dépit de l’opposition acharnée du régime, créer leur
syndicat indépendant. En octobre 2008, au cours d’une
assemblée générale avec la participation de la majorité
des salariés du complexe, le « Syndicat des Travailleurs
de la Sucrerie de Haft Tappeh » a été refondé et neuf
ouvriers ont été élus à sa direction aux bulletins
secrets. Les services de sécurité (la police politique)
de l’usine étaient présents mais ils se sont contenté à
« surveiller » et ne sont pas intervenue. La refondation
de ce syndicat, après deux années de luttes héroïques et
sans concession et, surtout, sans une demande
d’autorisation de l’Etat est une grande victoire pour le
mouvement ouvrier iranien et montre que le niveau de
conscience de classe et de lutte de ces travailleurs a
franchi un palier important.
Extrait du
« Message de félicitation des comités de soutien et de
solidarité avec les travailleurs iraniens au Syndicat
des travailleurs de Haft Tappeh »
Chers camarades ;
Nous sommes heureux d’entendre la nouvelle de la refonte de
votre syndicat « Syndicat des travailleurs de Haft
Tappeh » et l’élection de sa direction. L’établissement
des organisations syndicales indépendantes basé sur la
seule force des travailleurs a toujours été une des
principales revendications du mouvement ouvrier en Iran
et une force de progression de ce mouvement. Les
travailleurs du « Syndicat Vahéd de la Régie du
Transport du Téhéran et sa Banlieue » l’ont déjà créé et
maintenant vous, en dépit de tous les obstacles,
difficultés et l’opposition acharnée des appareils
d’Etat, y arrivé, encore mielleux sur une échelle plus
grande…
Nous vous félicitons chaleureusement et vous soutenons de
toutes nos forces. Nous essayons, comme dans le passé,
d’être votre porte voix à travers le monde, de
sensibiliser l’opinion publique des pays de notre
résidence et d’obtenir les soutiens de vos amis et
camarades de la classe ouvrière mondiale pour vos
combats futures. Nous félicitons, encore une fois, vous
et vos familles qui vous ont accompagné dans votre
combat contre le patronat et le régime
-
Comité de Solidarité avec les Travailleurs Iraniens –
Australie
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Association de la Défense des Travailleurs Iraniens – Norvège
-
La Solidarité Socialiste
avec les Travailleurs en Iran – France
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Association de Solidarité avec les Travailleurs en Iran –
Francfort et Banlieue (Allemagne)
-
Association de Solidarité avec le Mouvement des Travailleurs
en Iran – Hanovre (Allemagne)
-
Comité de solidarité avec des Travailleurs d’Iran et Suède –
Stockholm (Suède)
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Association de Solidarité avec les Travailleurs Iran –
Gutenberg (Suède)
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Conseil de Solidarité avec les Travailleurs en Iran –
Francfort (Allemagne)
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Association ouvrière « Jamal Tchéragh-Véissi », R.U
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