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Echo d'Iran N° 10, 2009-12-01,

 

Quelle place pour les travailleurs dans les évènements post-électoraux en Iran ?

Les évènements de masse post-électoraux en Iran, nés en réaction aux trucages massifs des pseudo « élections présidentielles » a débuté par une simple question : «où est passée ma voix?».

La réponse du régime militaro-islamique d’Iran n’a pas tardé : torture, assassinat, viol, arrestations massives, mascarades de shows télévisées en guise de procès et condamnations à mort de manifestants par les tribunaux du régime.

Après cela, le mouvement s’est radicalisé et des millions de manifestants ont scandés des slogans plus radicaux « A bas le régime » « A bas la dictature » « A bas la torture », exprimant une haine envers les dirigeants de ce régime fanatique d’un autre âge.

 Ces évènements sont un mouvement politique en réaction à tous les mécontentements engendrés par ce régime, à la fois dictatorial et fanatique religieux. La totalité du peuple y était représentée. Les manifestations regroupaient des travailleurs, des femmes, des représentants des minorités religieuses ou ethniques, des étudiants. Hors mis le mouvement étudiant, ces différents groupes n’étaient pas venus avec leurs revendications habituelles, mais bien pour manifester contre le régime en général.

 Les personnes qui réduisent les travailleurs au prolétariat industriel prétendent que les ouvriers n’étaient pas actifs dans ce mouvement et que celui-ci n’était que l'expression des classes moyennes. On ne peut pas être d’accord avec cette analyse. Outre les ouvriers, les catégories telles que les instituteurs, les infirmiers, les agents de services étaient présentes. Même s’il n’existe aucune donnée statistique sur la composition des manifestants, il aurait simplement été impossible d’en réunir des millions sans la participation de l’ensemble de ces catégories.

 Bien sur, les travailleurs pauvres sont avant tout préoccupés par les moyens de gagner leurs vies au quotidien, plutôt que de gagner leur liberté politique. C’est pour cela, que depuis 30 ans, même à l’époque du Shah, les travailleurs pauvres sont plus actifs pour revendiquer davantage de justice sociale que les classes moyennes, préoccupés par la liberté politique et civile. Les travailleurs pauvres et les cols bleus sont plus tournés vers la justice sociale que vers le droit social, au contraire des intellectuels et de la classe moyenne davantage prêts à défendre la liberté sociale et politique. Mais tout ceci était déjà vrai à l’époque du Shah.

La classe ouvrière est entrée en révolution contre le régime du shah plus tardivement que les intellectuels et la classe moyenne. Par contre, une fois dans le mouvement contre le Shah, leur participation a été décisive pour abattre le régime royal, à l’image des grèves des ouvriers du pétrole, de la sidérurgie et des mineurs …

 L’écart de revenus toujours grandissant entre les riches et les pauvres, la baisse du salaire minimum qui aujourd’hui est de 50% en dessous du seuil de pauvreté, la perte d’acquis sociaux par 90 % des travailleurs et la mise en place de lois néo-libérales des gouvernements successifs de Rafsanjani, Khatami et Ahmadinejad, favorisant privatisations et licenciements massifs, entraînent les travailleurs à lutter pour leur survie quotidienne plutôt que pour acquérir de nouveaux droits. Ils n’ont ni le temps ni les moyens de s’investir dans les problèmes politiques, démocratiques et culturels de la société pour défendre le droit à la citoyenneté. De plus, l’interdiction des syndicats, l’anéantissement de toutes organisations professionnelles ou politiques indépendantes, y compris les ONGs, le système policier et sécuritaire sur les lieux de travail, aussi bien au niveau national que régional et le recours aux arrestations, à la torture et à l’emprisonnement des dirigeants syndicaux et associatifs, ne laissent aucune place au combat indépendant de la classe ouvrière pour défendre ses droits. Les travailleurs en sont réduits à se défendre individuellement. Puisqu’ils ne peuvent compter sur aucune représentation sociale, ils sont aussi obligés de manifester à titre individuel plutôt que sous la bannière d’une organisation ou d’un syndicat ou une autre forme de collectivité.

 Il faut chercher les racines des évènements actuels, dans le mécontentement et le ras le bol des peuples iraniens, de la classe moyenne aux ouvriers. Les fraudes électorales n’en sont que le révélateur. Les réformateurs du régime islamique essaient de profiter des évènements pour sauver ce régime, économiquement capitaliste ultra libéral et politiquement théocratique moyenâgeux autant que pour sauvegarder leurs privilèges, dans une guerre économico-politique de factions. Les réformateurs essaient de récupérer le mouvement « vert » (symbole du chiisme radical) mais islamique représenté entre autres par Khatami et Moussavi. Ni Moussavi qui pendant les années ou il était premier ministre, les atteintes aux droits de l’Homme étaient à leur apogée, ni Khatami avec son bilan de huit années de la présidence, ne sont pas pour un régime laïc et démocratique, ni pour le droits des travailleurs et des minorités ou la liberté pour les femmes. Au contraire. Les réformateurs craignent autant qu’Ahmadinejad que le mouvement de masse remet en cause l’ensemble du régime islamique et que les mouvements ouvriers puissent arborer les drapeaux anti capitaliste et renverser le régime islamiste comme le régime monarchique l'a été en 1979. Les conservateurs représentés par Khamenei-Ahmadinejad et les réformateurs du mouvement « vert » mènent une guerre au sein de la classe dirigeante, pour s’emparer du pouvoir et de l’économie.

 A défaut de partis politiques, de syndicats indépendants et de libertés individuelles et collectives, le peuple est obligé de profiter de ces évènements, non pas pour favoriser une faction ou l’autre, mais pour balayer l’ensemble du régime. Soutenir le mouvement « vert », tant que il n’a pas déclaré une position très nette et clair vis-à-vis des droits de l’Homme, des libertés des femmes, les libertés individuelle et de la laïcité, serait une erreur fatale pour les peuples iraniens, la classe ouvrière, la jeunesse et les femmes. Même si les peuples iraniens peuvent, à terme, se débarrasser de la faction conservatrice représentée par la tyrannie de Khamenei-Ahmadinejad, les dirigeants « verts » et les « réformateurs » sont aussi menaçants et dangereux que leurs rivaux.

 Le seul salut pour l’avenir de ces peuples est l’intervention massive de tous les acteurs de la société, surtout de la classe ouvrière dont les revendications économiques et sociales peuvent mettre fin à ce régime. 

 

 

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